vendredi 3 février 2012

Les Anglais devant Québec en 1690

Les événements de l’automne 1690 contribuent brutalement à rappeler aux habitants de la Nouvelle-France la fragilité de leur situation. En octobre, une flotte anglaise remonte le fleuve Saint-Laurent. Le mandataire des colonies de Massachusetts et de New York, William Phips, qui avait quitté Boston le 20 août, se présente devant Québec à la tête d'une flotte. Il veut chasser les Français de la Nouvelle-France. Les vaisseaux anglais jettent l'ancre devant la baie de Beauport le 16 octobre.

À Québec, quand la rumeur se répand qu’une flotte anglaise remonte le fleuve, on envoie un émissaire à Montréal pour alerter le gouverneur Frontenac. Frontenac avait quitté Québec en juillet. Frontenac écrit le 12 novembre suivant:
[…] je ne laissai pas d'arriver à Québec le 14 octobre, à 10 heures du matin, où j'appris que les ennemis […] étaient à sept lieues de Québec.
[…] le lundi (le 16 octobre), à l'aube du jour, ils doublèrent la pointe de Lévy et parurent à notre vue et dans notre rade au nombre de 34 voiles, dont il y avait 4 gros vaisseaux […] (1).

La situation est grave. La défense s'organise. Les habitants des quartiers de la Basse-Ville de Québec abandonnent leurs maisons. Phips somme Frontenac de capituler avant d’engager une vaine bataille On connaît cette célèbre réplique de Frontenac à l’émissaire anglais porteur d’une demande de reddition : « […] Je n’ai point de réponse à faire à votre général que par la bouche de mes canons et à coups de fusil […] »(2).

L'offensive anglaise connaît des ratés et piétine. Après avoir canonné la ville sans trop de succès, les Anglais tentent un débarquement. Ils choisissent le lieu connu sous le nom de la Canardière, c'est-à-dire non loin de la terre de Pierre Parent, à la seigneurie de Notre-Dame-des-Anges. Même installés à terre, la situation des envahisseurs ne s'améliore pas. Par exemple, une quarantaine de séminaristes, sous les ordres de Nicolas Juchereau de Saint-Denis, réussissent à s'emparer de six canons ennemis placés sur les battures de Beauport. Rapidement désorganisés et voyant la saison avancée, les Anglais rembarquent dans la nuit du 21 au 22 octobre et s'en retournent, déconfits.

Québec l’a échappé belle. L’alerte a été vive. Pierre Parent et les siens ont vu des troupes anglaises piétiner le sol de la seigneurie de Notre-Dame-des-Anges et ses habitants ont entendu les détonations des mousquets des combattants embusqués dans leur voisinage et le vacarme des canons qui pilonnaient Québec.

Après avoir repoussé les Anglais, la population de Québec célèbre la « Fête de la victoire » le 5 novembre, et on donne le nom de Notre-Dame-de-la-Victoire à une église en construction depuis 1688 et qu'on achèvera bientôt. L'alerte passée, les habitants de la région recommencent à s'activer.

L'attaque anglaise sur Québec donne l'occasion à Robert de Villeneuve, le cartographe du roi, d'illustrer cette action. Ce faisant, il reproduit les détails de la partie de la côte de Beauport correspondant à la partie sud de la seigneurie de Notre-Dame-des-Anges, identifiant les emplacements habités et leurs propriétaires. La carte de Robert de Villeneuve procure une précieuse information généalogique sur les habitants de cette seigneurie en 1690. Sur sa carte, chaque emplacement est numéroté à partir de la rivière Beauport jusqu'à l'embouchure de la rivière Saint-Charles et, dans la légende, on trouve le nom des propriétaires associés aux numéros des emplacements. De plus, on identifie les habitants du lieu nommé le « Petit Village ».
Liste des habitants de la côte de la seigneurie de Notre-Dame-des-Anges en 1690 selon la carte de Robert de Villeneuve

1. Château de Beauport où l'on prend la pierre pour bâtir
2. Pierre Parent père
3. Jacques Parent
4. Maison des Jésuites
5. Pierre Parent le fils
6. Veuve de Mathieu Choret
7. Michel Huppé
8. M. de La Durantaye
9. La veuve de Paul Chalifou
10. M. de Vitray
11. François Retor
12. Mademoiselle Denis
13. Étienne Lionnois
14. Timothée Roussel
15. Jean Le Normand
16. M. Charon où est la briqueterie
   
Les habitants du « Petit Village »
   
17. Joseph Rancourt
18. André Coudray
19. Jean Le Normand
20. M. de Saint-Siméon

1. Correspondance de Frontenac avec la Cour de France, 1672-1682, 1689-1698, lettre du 12 novembre 1690, Québec, 1929..
2. Relation par Charles de Monseignat de ce qui s'est passé de plus remarquable au Canada depuis le mois de novembre 1689 jusqu'au mois de novembre 1690. Archives nationales d'outre-mer (ANOM), COL C11A 11/fol.5-40. [En ligne: http://bd.archivescanadafrance.org/acf/search-acf.xsp]
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